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Les rendez-vous de Philopop

41 Episodes

48 minutes | Mar 12, 2023
Les Rendez-vous de Philopop - La retraite, pour quelle vieillesse ?
Les Rendez-vous de PHILOPOP- émission du 12 mars 2023 La retraite, pour quelle vieillesse ? Réflexion à partir de la lecture du livre de Simone de Beauvoir publié en 1970 « La vieillesse » (collection Folio) La retraite n'est pas seulement un problème économique et social. Elle met en jeu l'idée que nous avons de la vieillesse et de notre existence. Si la condition des vieillards a changé depuis 1970 (l'âge de départ à la retraite était alors de 65 ans, et le niveau des pensions était très faible), la vieillesse est toujours considérée principalement en termes de soins, de dépenses et de coût. Elle souffre d'une image négative. 1- Pourquoi la vieillesse apparaît-elle surtout comme une déchéance ? Le déclin biologique auquel elle correspond suffit-il à expliquer le regard dépréciatif porté sur elle ? Si le spectre de la vieillesse a reculé depuis 1970 (il concerne avant tout ce qu'on appelle aujourd'hui le « 4ème âge »), il n'a pas pour autant disparu. La vieillesse est toujours l'objet d'une « conspiration du silence » (selon la formule de S. de Beauvoir). C'est un sujet « triste » qu'on préfère éviter. Les raisons pour lesquelles S. de Beauvoir a écrit son livre sont toujours actuelles. Ainsi dénonce-t-elle l'ostracisme qui frappe les vieillards (ils sont traités en « parias »). Et « nous poussons si loin l'ostracisme que nous allons jusqu'à le tourner contre nous-même : nous refusons de nous reconnaître dans le vieillard que nous serons » (Introduction). 2- La vieillesse comme « situation humaine ». Que signifie « être vieux » ? a- La vieillesse n'est pas seulement un fait biologique, c'est aussi un fait culturel : il est impossible de penser le vieillissement sans prendre en considération la société dans laquelle il se produit. Les données objectives de la biologie et de la médecine (chapitre 1), de l'ethnologie (chapitre 2), de l'histoire (chapitre 3), de la sociologie (chapitre 4). Comme « situation humaine », la vieillesse a un double dimension : objective (à ce titre, elle est objet de savoir) et subjective (c'est une expérience vécue qui peut faire l'objet d'une description phénoménologique) b- Comprendre de quelle manière le vieillard intériorise l'image de la vieillesse que la société lui renvoie (chapitres 5 et 6) : voir ainsi la découverte de la vieillesse à partir du regard d'autrui. « La complexe vérité de la vieillesse : elle est un rapport dialectique entre mon être pour autrui, tel qu'il se définit objectivement, et la conscience que je prends de moi-même à travers lui. En moi, c'est l'autre qui est âgé, c'est à dire celui que je suis pour les autres : et cet autre, c'est moi » (p-400) (…) « Ce que nous sommes pour autrui, il nous est impossible de le vivre sur le mode du pour soi » (p-410). Ainsi, en intériorisant le regard dévalorisant des autres, le vieillard se fige et se réifie dans une perception dégradante de lui-même. 3- Pourquoi la vieillesse est-elle l'objet d'un processus de déshumanisation ? a- Une déchéance économique et sociale : « Le vieillard est celui qui ne peut plus travailler et qui est devenu une bouche inutile » (p-59). Dans le cadre d'une société qui valorise l'homme actif et réduit l'humanité au travail productif fondé sur la force de travail (c'est celle que décrit S. de Beauvoir), la retraite est vécue par les travailleurs comme un exil brutal et une rupture d'identité qui précipitent leur vieillissement, et entraînent leur déchéance (chapitre 4, voir particulièrement les pages 371 à 377) b- Les conséquences existentielles de ce processus de déshumanisation sur les vieillards : une altération de leur rapport au temps, à leur histoire, à l'existence (l'absence de tout projet, la perte des raisons d'agir, voir chapitre 6) 4- Comment résoudre le problème de la vieillesse ? Que faire pour que les hommes soient tous considérés jusqu'à la fin de leur vie comme des hommes ? (conclusion du livre) Ce problème n'est pas seulement un problème individuel, il n'est pas non plus simplement un problème sociétal (que prendrait en charge une « politique de la vieillesse »), c'est un problème social et politique qui exige une transformation profonde de la société. Lecture de quelques extraits de la conclusion de Simone de Beauvoir.
52 minutes | Jan 29, 2023
Les Rendez-vous de Philopop : La peine de mort comme « assassinat public »
Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 29 janvier 2023 La peine de mort comme « assassinat public » (Beccaria) Réfléchir sur la peine de mort à la lumière du Traité des délits et des peines (1764) de C. Beccaria : « Si je prouve que cette peine n'est ni utile ni nécessaire, j'aurai fait triompher la cause de l'humanité » (§ 28). Qui est Beccaria ? De 1791 à 1981 : une brève histoire de l'abolition de la peine de mort en France La peine de mort dans le monde aujourd'hui Pourquoi, malgré les progrès de l'abolition, l'abolitionnisme est-il une position fragile ? Le problème est de nature politique : l'Etat dispose-t-il d'un droit de vie et de mort qui l'autorise à un tuer un homme pour son crime ? Ou la peine de mort est-elle au contraire « un assassinat public » ? 1- Le droit pénal implique-t-il le droit de donner la mort ? a- Le criminel comme ennemi. Pourquoi le droit de vie et de mort est-il considéré comme un attribut essentiel de la souveraineté ? b- « La mort-supplice » (2ème chapitre de Surveiller et punir de Michel Foucault, 1975). L'exemple du supplice infligé à Damiens en 1787 pour crime de régicide (1er chapitre). 2- Le droit pénal n'a d'autre fonction que l'utilité commune (Beccaria) a- L'origine contractuelle du droit pénal (§ 1) : d'une « liberté rendue inutile » (état de nature) au sacrifice d'une part de sa liberté pour jouir du reste de la liberté garantie par les lois (état civil) b- Les châtiments sont nécessaires pour empêcher « l'esprit despotique » du criminel de « replonger dans l'ancien chaos les lois de la société » c- Un châtiment n'est juste que s'il est nécessaire (pour défendre l'utilité commune), sinon il est « tyrannique » (§ 2). Sa fonction est préventive (« Le but des peines n'est ni de tourmenter et d' affliger un être sensible, ni de faire qu'un crime déjà commis ne l'ait pas été ».... il est « d'empêcher le coupable de causer de nouveaux dommages et de dissuader les autres d'en commettre de semblables », § 12) 3- La peine de mort est injuste (elle ne peut être un droit) ; elle est inutile (aucune efficacité dissuasive) et elle est même nuisible (criminogène). Lecture du § 28. a- Elle n'est pas un droit : aucun homme ne peut avoir consenti à confier au souverain le droit de lui ôter la vie (le sacrifice d'une part de sa liberté ne peut comprendre celui « du plus grand de tous les biens » qu'est la vie)- « Sous le règne paisible de la légalité » (dans le cadre d'un Etat de droit), la peine de mort ne peut jamais être un droit. Un citoyen ne peut jamais être une « menace pour la sécurité de la nation ». Il ne peut être un danger que lorsque les lois s'effondrent : dans une guerre civile, on ne punit pas un criminel, on cherche à vaincre un ennemi. b- La peine de mort est inutile : elle n'a aucune efficacité dissuasive L'histoire montre qu'elle n'a jamais empêché le crime Il n'y a aucune proportionnalité entre la sévérité de la peine et l'efficacité dissuasive : la réclusion à perpétuité est moins sévère pour le coupable que la peine de mort, et plus dissuasive. c- « La peine de mort est nuisible par l'exemple de la cruauté qu'elle donne » En « ordonnant un assassinat public », l'Etat alimente la violence qu'il prétend empêcher La « répulsion invincible » des hommes à la vue du bourreau, fondée sur la conviction que « leur vie n'est au pouvoir de personne ». Conclusion : La peine de mort est appliquée surtout aux hommes les plus démunis qui n'ont rien à perdre en commettant des crimes. Elle est le châtiment d'un Etat despotique dont les lois contribuent à « concentrer les avantages de la société sur un petit nombre et à accumuler d'un côté la puissance et le bonheur et de l'autre la faiblesse et la misère » (Introduction et § 28) Bibliographie : Traité des délits et des peines (1764) de Beccaria, surtout l'introduction, et les § 1, 2, 12, 28 Contrat social Livre II, chapitre 5 de J. J. Rousseau (1762) Surveiller et Punir, chapitres 1 et 2, de Michel Foucault (1975) L'Abolition, Robert Badinter (2000)
45 minutes | Dec 18, 2022
Les Rendez-vous de Philopop : Peut-on parler d'un châtiment divin ?
Le récit de la Genèse est présenté traditionnellement comme le texte du « péché originel ». Sa lecture valide-t-elle cette interprétation ? Ce récit enseigne-t-il la vérité de la condition pécheresse de l'homme, comme l'affirment Saint-Augustin (354- 430) et Pascal (1623-1662) à sa suite, - ou n'est-il qu'un texte anthropomorphique exprimant la vision d'un homme ignorant, selon la lecture qu'en fait Spinoza (1632- 1677)? Peut-on dire qu'Adam, le premier homme, est puni par Dieu pour avoir désobéi à son commandement, et condamne le genre humain à la souffrance pour le prix de sa faute ? 1- Examen du récit de la Genèse (particulièrement de ses chapitres 2 et 3) a- Les trois étapes du récit : 1- le don du jardin par Dieu et l'énoncé de son commandement ; 2- l'irruption du serpent : de la tentation à la faute ; 3- le châtiment de Dieu et l'expulsion d'Adam et Eve du jardin b- Dieu a-t-il prononcé l' interdiction de manger du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, ou a-t-il exprimé seulement un avertissement concernant la nocivité de ce fruit ? La reformulation de l'énoncé divin par le serpent et la femme et son interprétation insistante en termes d'interdit (« Dieu a dit : (…) Vous n'y toucherez pas ») c- Une mise en cause de la crédibilité de la parole divine 2- Les difficultés auxquelles se heurte l'interprétation théologique du récit en termes de péché originel a- Une faute bien étrange dont Adam ne peut prendre conscience qu'en mangeant du fruit de l'arbre de la connaissance du Bien et du Mal b- L'idée d'une corruption de la nature originelle de l'homme est incompréhensible : comment comprendre que cet être que Dieu a créé bon et tout-puissant (il le fait à son image) fasse l'expérience de sa faiblesse en cédant à la tentation ? c- Ces difficultés n'empêchent pas les théologiens et les moralistes d'affirmer le libre-arbitre de l'homme et de soutenir en même temps le dogme du péché originel 3- La critique par Spinoza des présupposés de cette conception théologique a- Le libre-arbitre est une illusion ; il n'exprime pas une véritable liberté mais traduit une impuissance b- C'est une illusion qui fait obstacle à la connaissance de l'homme et de Dieu c- Dieu n'est pas à l'image que l'homme se fait de lui-même (en se croyant doté d'un libre-arbitre) : il n'est pas une volonté qui crée l'univers et qui s'adresse aux hommes par des commandements, et rétribue leurs actes par des récompenses ou des châtiments ; il est le Réel en sa totalité (la Nature) en tant qu'il se produit selon des lois nécessaires et produit toutes les choses qui sont en lui. Ses lois sont des « vérités éternelles » qui expriment des rapports nécessaires et non des commandements. 4- La lecture que fait Spinoza du récit de la Genèse (Traité théologico-politique, chapitre 4) a- Le récit de la Genèse exprime la vision anthropomorphique d'un ignorant qui imagine Dieu comme une volonté qui s'adresse à lui et exige de lui obéissance b- Selon ce récit, Dieu n'interdit aucunement à Adam de manger du fruit de l'arbre de la connaissance du Bien et du Mal, mais il l'avertit de sa nocivité. Il ne peut donc pas y avoir de faute d'Adam. c- Ce n'est qu'après en avoir mangé et souffert de son effet nocif, qu'Adam interprète sa souffrance comme le châtiment de Dieu Conclusion : En quoi le fruit de l'arbre de la connaissance du Bien et du Mal agit-il comme un poison ? Réflexion sur la différence entre la morale et la sagesse. Bibliographie : Genèse, chapitres 2 et 3 Spinoza : Préfaces des 3ème et 4ème parties de l'Ethique, Traité politique, chapitre 2, § 6 ; et surtout, Traité théologico-politique, chapitre 4.
45 minutes | Oct 30, 2022
Les Rendez-vous de Philopop : « La raison du plus fort est toujours la meilleure »
Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 30 octobre 2022 « La raison du plus fort est toujours la meilleure » Chacun aura reconnu la célèbre morale du Loup et de l'agneau de Jean De la Fontaine. Pour comprendre ce qu'est la « raison du plus fort », il est utile d'examiner la manière de raisonner du loup dans la fable. Cette morale peut susciter deux lectures : Selon la première, c'est une morale ironique : la « raison du plus fort » consiste à déguiser la force en droit ; elle revient à donner une apparence de justification à ce qui n'est que le décret arbitraire du plus fort. C'est la lecture de Rousseau dans le Contrat social (1762) Selon la seconde, c'est une morale réaliste : il faut se résoudre à reconnaître que seule la force est en mesure d'instituer le droit et de faire régner la paix. La raison du plus fort est ainsi toujours la meilleure. C'est la lecture de Pascal, dans ses Pensées, parues après sa mort en 1670. L'examen de la morale du Loup et de l'agneau nous conduit ainsi à nous interroger sur la nature du droit : s'oppose-t-il à la force (Rousseau) ou se ramène-t-il au contraire à elle (Pascal) ? 1- Le droit contre la force (Rousseau, Contrat social, Livre I, chapitre 3) a- La faiblesse de la force explique que le plus fort ait besoin du droit du plus fort pour maintenir sa domination. b- C'est un « prétendu droit » reposant sur la confusion de la force et du droit, dont l'efficacité consiste à capter le consentement des opprimés à leur oppression (ils se croient « obligés » d'obéir alors qu'ils sont « contraints ») c- En dissipant cette confusion et en ramenant la force à ce qu'elle est (une « puissance physique »), les peuples ont raison de s'insurger et de chercher à renverser le rapport de forces en leur faveur (« Puisque le plus fort a toujours raison, il ne s'agit que de faire en sorte qu'on soit le plus fort », Rousseau fait ici allusion à la morale du Loup et de l'agneau) d- Instituer un véritable droit et établir une autorité légitime : c'est l'objet du Contrat social. 2- Seule la force fait le droit (Pascal, Les Pensées) a- L'idéal serait que la justice (« qualité spirituelle ») soit toujours suivie et secondée par la force (« qualité physique »), mais « ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste » (Pensée 298, édition Brunschvicg) b- L'explication de cet état de fait est la suivante : « La justice est sujette à dispute » ; « La force est très reconnaissable et sans dispute » c- Ainsi, seule la force peut tenir les hommes en respect en instaurant un droit qui mette fin aux querelles. d- Comme la force ne peut d'elle-même engendrer un sentiment de justice, il faut qu'elle soit occultée comme force pour qu'elle paraisse la justice dans l'imagination du peuple à travers les lois établies (il faut qu'il oublie avec le temps la violence originelle, - « l 'usurpation »- du plus fort, Pensées 294, 304, 326). 3- Ces deux lectures s'appuient sur deux conceptions de l'homme radicalement différentes : Pour Pascal, l'émancipation des hommes et des peuples est illusoire (la « concupiscence » est au principe de leurs actions, la politique consiste à « régler un hôpital de fous ») ; pour Rousseau, elle est une exigence, certes difficile à réaliser Mais l'un et l'autre s'accordent à reconnaître le rôle de l'imagination dans la domination du plus fort Bibliographie: - Le Contrat social de J. J; Rousseau, Livre I, chapitre 3 ("Du droit du plus fort"), 1762, collection G/F - Les Pensées de Pascal, 294, 298, 299, 304, 326, édition Brunschvicg, collection G/F, parues après sa mort en 1670 - Les Trois Discours sur la condition des Grands de Pascal
35 minutes | Sep 18, 2022
Les Rendez-vous de Philopop : Présentation des activités de PHILOPOP et du programme de la saison 2022-2023
La première séance aura lieu le jeudi 22 septembre de 20H30 à 22H30 au lycée Claude Monet du Havre. Outre les séances qu'elle y organise régulièrement, PHILOPOP donne une émission mensuelle (les Rendez vous de Philopop) sur Ouest Track radio. 1- PHILOPOP, une association ouverte à tous Quelques précisions d'ordre pratique  : Vous trouverez sur le site de PHILOPOP (https://sites.google.com/site/philopoplh/) le barème des cotisations, le calendrier adopté, le rythme des séances (en moyenne 2 fois par mois un mardi ou un jeudi de septembre à début juin hors vacances scolaire), le lieu et l'horaire  (au Lycée Claude Monet du Havre, salle audio, de 20H30 à 22H30) Les questions philosophiques  : des questions que tout homme peut être amené à se poser au cours de son existence (exemples de la vérité, de la justice, de la liberté...) L'ambition de PHILOPOP : permettre à tous ceux qui le souhaitent d'accéder à un questionnement philosophique en offrant les conditions d'un travail suivi 2- La formule d'un cours progressif (suivi d'une discussion) Il ne consiste pas dans un exposé de connaissances et ne présente pas la pensée des philosophes comme une opinion savante Il montre comment l'examen d'une notion (la vérité, la justice, la liberté, la mémoire...) conduit à formuler un ou des problèmes qui s'imposent nécessairement. La lecture des philosophes n'a pas d'autre intérêt que d'éclairer la réflexion, et de l'aider à aborder ces problèmes. 3- Le programme de la saison 2022-2023 Les séances sont accompagnées d'un plan et enregistrées. L'enregistrement est accessible aux adhérents Le thème  : Le châtiment L'oeuvre  : L'Evolution créatrice de Henri Bergson, collection Quadrige aux P.U.F L'émission des Rendez vous de Philopop de ce dimanche 18 septembre (reprise le dimanche 25 septembre) n'a d'autre but que de vous expliquer la démarche de l'association (Philopop, association populaire de philosophie du Havre, créée en 2007) et de vous présenter brièvement le programme de la saison 2022-2023 Les 3 premières séances au lycée Claude Monet: jeudi 22 septembre, jeudi 6 octobre, mardi 18 octobre Site internet de PHILOPOP: https://sites.google.com/site/philopoplh/
54 minutes | Jul 31, 2022
Les Rendez-vous de Philopop : La civilisation peut-elle lutter contre la guerre?
Réflexion à partir de deux textes de Freud consacrés à la question de la guerre: Propos d'actualité sur la guerre et sur la mort (1915), collection G/F, et Pourquoi la guerre  ?, correspondance Einstein/Freud (1932), collection Rivages poche. La guerre d'Ukraine nous a déjà conduit à réfléchir sur la guerre, à partir de l'oeuvre de Clausewitz, « De la guerre», mais dans une toute autre perspective. La 1ere guerre mondiale a engendré un profond désarroi : jamais les hommes des nations dites «civilisées», ne pouvaient imaginer au début du XXème siècle qu'ils connaîtraient un tel déchaînement de violence. La cause de ce désarroi, ce sont les «désillusions» concernant le processus de civilisation que Freud se propose de «traiter» Pourquoi a-t-on eu besoin de croire que la civilisation élève progressivement à la moralité ? En quoi est-ce là une «illusion» que la 1ère guerre mondiale vient «fracasser»? 1- Pourquoi l'idée d'un progrès moral de la civilisation est-elle illusoire ? a- L'exposé des idéaux de l'homme «civilisé»: le processus de civilisation entraînerait un progrès de la moralité (à tous les niveaux, individus, peuples, Etats), qui rend inconcevable une guerre comme la 1ere guerre mondiale (c'est à dire une guerre qui «interrompt le développement des relations morales entre les peuples et les Etats ») b- Comment expliquer que cette guerre ait pu engendrer un tel déchaînement de violence? La guerre pervertit l'Etat. Alors qu'il est censé fonder son existence sur des règles de justice qu'il impose aux hommes placés sous son autorité, il s'en affranchit totalement en temps de guerre («si l'Etat interdit à l'individu l'usage de l'injustice, ce n'est pas parce qu'il veut l'éliminer, mais parce que, au même titre que le sel et le tabac, il veut la monopoliser»). Le cynisme de l'Etat entraîne alors « un relâchement de toutes les relations morales» qui révèle leur grande fragilité. c- Comment l'homme devient-il capable de moralité ? L'homme n'est ni bon ni mauvais en soi (sont «mauvaises» les pulsions incompatibles «avec les exigences de la communauté humaine»); l'éducation peut transformer de manière assez limitée ses pulsions mauvaises en pulsions sociales mais ne peut jamais complètement les éradiquer; ainsi, « il y a bien plus d'hypocrites civilisés que d'hommes vraiment civilisés». Notre désillusion concernant la valeur de la civilisation est-elle vraiment justifiée? «En réalité, les hommes ne sont pas tombés aussi bas que nous le craignions, pour la bonne raison qu'ils ne s'étaient pas élevés aussi haut que nous nous l'étions figuré» 2- Si la guerre s'explique par des pulsions destructrices, est-elle pour autant une fatalité? (Pourquoi la guerre? Correspondance de Freud avec Einstein, 1932) a- La 1ere partie de la réponse de Freud : une reprise de la réflexion du philosophe Kant sur la guerre et la paix : 1- le droit comme «violence de la communauté»; 2- l'histoire achemine les Etats paradoxalement par le moyen de la guerre, vers la paix perpétuelle; 3- la solution d'une Société des Nations qui aurait le pouvoir d'imposer ses arbitrages aux Etats et de mettre ainsi un terme à la guerre b- La 2ème partie de la réponse est constituée par l'apport de la psychanalyse à la réflexion : 1- la paix est irréalisable parce que la guerre est l'expression de la vie pulsionnelle des hommes (elle met en œuvre la pulsion de destruction à l'échelle collective, pulsion qui est dérivée de la pulsion de mort ); 2- le désir de paix qui s'oppose à cette pulsion, est soutenu par la pulsion de vie (Eros) qui s'exprime par la production de «liens de sentiment » (« Si la propension à la guerre est un produit de la pulsion destructrice, il y a donc lieu de faire appel à l'adversaire de ce penchant, à l'Eros. Tout ce qui engendre, parmi les hommes, des liens de sentiment doit réagir contre la guerre»).
58 minutes | Jun 26, 2022
Les Rendez-vous de Philopop : Devoir d'oubli ou devoir de mémoire ?
Réflexion sur la mémoire collective, principalement à partir de la Conférence d'Ernest Renan, Qu'est-ce qu'une nation ? (1882), et du livre de l'historien Henry Rousso, Le syndrome de Vichy, paru en 1987. Pour mettre fin à une guerre civile, faut-il prescrire l'oubli des violences et des crimes pour réconcilier les citoyens ennemis et reconstruire l'unité de la Cité ? Ou faut-il au contraire en perpétuer le souvenir afin de prévenir leur répétition ? Devoir d'oubli ou devoir de mémoire ? La 1ère solution fut longtemps privilégiée : 3 exemples. Exemple du serment que devaient prononcer les citoyens d'Athènes de ne plus rappeler les violences de la guerre civile qui eut lieu en 404 av J.C. ; exemple de l'édit de tolérance de 1598 exigeant que la mémoire des choses passées (les guerres civiles entre catholiques et protestants) « demeure éteinte et assoupie comme chose non advenue « ; exemple plus récent des lois d'amnistie de 1951 et 1953 concernant les faits de collaboration sous Vichy Pourquoi l'oubli nous paraît-il aujourd'hui inacceptable ? Pourquoi la mémoire est-elle devenue une obligation ? 1- Pour préserver l'unité et l'identité d'une nation, n'est-il pas nécessaire d'exclure de sa mémoire commune les pages noires de son histoire ? « L'oubli, -je dirai même l'erreur historique- sont un facteur essentiel de la création d'une nation » (Ernest Renan dans Qu'est-ce qu'une nation ? 1882) 2- L'impossible effacement du souvenir d'une guerre civile comme celle qui eut lieu sous Vichy entre 1940 et 1944 (Henry Rousso, Le syndrome de Vichy, 1987) En quoi la période de Vichy fut-elle « une tragédie d'une exceptionnelle gravité » ? « Le syndrome de Vichy est l'ensemble hétérogène des symptômes, des manifestations (…) qui révèlent l'existence du traumatisme engendré par l'Occupation » (particulièrement celui qui est lié aux divisions opposant les Français). Le projet de l'historien du syndrome de Vichy : étudier les manifestations de la mémoire de Vichy et ses transformations au cours de son devenir depuis 1944, à la manière dont Freud aborde les symptômes d'une névrose (un bref rappel de la leçon de Freud). Le traumatisme ne peut être effacé, mais survit de manière souterraine à travers son refoulement. 3- Les 4 phases de l'histoire de la mémoire de Vichy depuis 1944 : - de 1944 à 1954, de l'épuration jusqu'aux lois d' amnistie : le « deuil inachevé » de 1954 à 1971, le « refoulement » du traumatisme : le silence officiel sur le régime de Vichy, le « mythe résistancialiste » (l'assimilation de la « Résistance » à l'ensemble de la nation) de 1971 à 1974, le « miroir brisé ». Le « retour du refoulé » (la réémergence dans le débat public du passé de Vichy sur la collaboration et la responsabilité du régime dans la déportation des Juifs dans les camps de la mort) depuis 1974, le réveil de la mémoire juive, la réouverture de procédures judiciaires contre d'anciens nazis et d'anciens collaborateurs ayant échappé pendant des décennies à toute justice, la requalification de leurs crimes en « crimes contre l'humanité » (dont l'imprescriptibilité est reconnue depuis la loi de décembre 1964). 4- La mémoire collective implique un nouveau rapport au passé - elle est d'abord une exigence de justice à l'égard des victimes des crimes du passé (reconnaissance des torts et réparation) - elle ne repose plus sur une adhésion irréfléchie à un passé mythifié et une forme d'allégeance mais aborde le passé (ses épisodes conflictuels) comme « un problème à résoudre ». Ce n'est possible que dans une démocratie où les citoyens débattent et construisent l'identité de leur nation. Bibliographie : Qu'est-ce qu'une nation ? Ernest Renan, 1882 Le syndrome de Vichy, Henry Rousso, 1987 Face au passé, Henry Rousso
51 minutes | May 1, 2022
Les Rendez-vous de Philopop : L'enfer, c'est les Autres
Les Rendez vous de PHILOPOP, émission du 1er mai 2022 « L'enfer, c'est les Autres » « Alors, c'est ça l'enfer (…) Vous vous rappelez : le soufre, le bûcher, le gril... Ah ! Quelle plaisanterie. Pas besoin de gril : l'enfer, c'est les Autres » Ce sont les paroles de Garcin, l'un des trois personnages de Huis-Clos, à la fin de la pièce que J.P. Sartre produit la 1ère fois en 1944. Que veut dire la formule devenue célèbre : « L'enfer, c'est les autres » ?Sartre conclut-il que nos rapports avec les autres sont toujours infernaux ? Qu'en est-il de notre relation avec autrui ? Pour en éclairer le sens, lisons ou relisons Huis Clos à la lumière des analyses de Sartre dans la 3ème partie de l'Etre et le Néant (1943) dont le titre est : « Le pour-autrui ». 1- Le dispositif qui permet de faire du salon de Huis-Clos un enfer : les personnages sont éternellement livrés au regard des autres 2- L' analyse des relations avec autrui dans la 3ème partie de l'Etre et le Néant a- Il n'y a d'expérience d'autrui que si je l'appréhende comme sujet (conscience). Si ma perception ne me révèle que des objets, comment puis-je savoir avec certitude qu'autrui est une autre conscience (un autre sujet, un autre moi qui n'est pas moi) ? b- L'expérience d'autrui comme épreuve d'une décentration de ma perception du monde et d'un regard qui m'objective L'exemple du jardin public (le Square St Roch au Havre?) : « Ainsi tout à coup un objet est apparu qui m'a volé le monde » L'exemple du trou de serrure (l'expérience de la honte) : c'est en m'éprouvant comme objet du regard d'autrui que je fais au coeur de ma conscience l'expérience de sa présence comme sujet c- Le regard d'autrui me révèle que je ne suis pas une pure conscience et que j'ai aussi un dehors qui peut être jugé et qualifié. Je découvre que je suis désormais quelqu'un, et que ce que je suis m'échappe, puisque ce que je suis dépend de la perception qu'autrui a de moi : « Ma chute originelle, c'est l'existence de l'autre ». 3- L'épreuve du regard d'autrui comme enfer (retour à Huis Clos) a- L'absence de miroir dans Huis Clos fait de chacun des personnages la proie du regard des autres. Le regard d'autrui impose ainsi à la conscience un dehors qu'elle ne contrôle pas et qu'il peut métamorphoser à volonté (voir la scène où, faute de retrouver sa glace de poche, Estelle s'aliène au regard d'Inès) b- Si l'enfer ne peut avoir d'autre lieu que les autres  (ils nous enferment dans leurs jugements et nous assignent une identité), cela ne signifie pas que cet enfermement est définitif. Il ne l'est que lorsqu'on est mort ou que nous nous comportons dans l'existence comme des morts-vivants pour qui les jugements des autres sur eux sont définitifs. Etre mort (comme les personnages de Huis Clos), c'est être dans l'impossibilité d'agir sur notre existence et de donner un nouveau sens à notre passé ; c'est être condamné au jugement que les autres (les vivants) porteront sur nous: « Pour la vie morte, les jeux sont faits (…) Etre mort, c'est être en proie aux vivants » (L'Etre et le Néant, 4ème partie, chapitre 2, E : « Ma mort », page 712) 4- C'est le conflit qui donne vie aux relations avec autrui a- Il y a conflit en ce que chaque conscience vise à surmonter sa dépendance originelle à l'autre en maîtrisant sa relation avec lui b- L'exemple de l'amour : il est la tentative de posséder la liberté de l'autre pour le contraindre à me reconnaître comme sa raison d'être ; cette tentative doit demeurer impossible pour que l'amour ait un avenir c- Si le conflit est ce qui fait la vie de la relation avec autrui, l'enfer commence avec le tiers. La relation amoureuse qui s'ébauche entre Garcin et Estelle meurt très vite d'être objectivée sous le regard d'Inès (voir Huis-Clos) Bibliographie : -Huis Clos de Jean Paul Sartre, collection Folio -L'Etre et le Néant, 3ème partie (« Le pour-autrui »), collection Tel/ Gallimard - Huis Clos mis en scène par Robert Hossein sur youtube : https://www.youtube.com/watch?v=ila9Vjpp3yE
50 minutes | Mar 13, 2022
Les rendez-vous de Philopop : La guerre est-elle vraiment la continuation de la politique par d'autres moyens ?
Les Rendez vous de PHILOPOP, émission du 13 mars 2022 La guerre est-elle vraiment la continuation de la politique par d'autres moyens ? Réflexion à partir de la lecture du traité de Clausewitz (1780- 1831),« De la guerre » Le 24 février 2022, Vladimir Poutine décide d'envahir l'Ukraine et menace de faire usage de l'arme nucléaire si on l'empêche d'arriver à ses fins. Si, comme l'explique Clausewitz, la guerre est un moyen pour la politique d'atteindre ses fins quand tous les autres ont échoué, est-elle encore un moyen de continuer la politique si, livrée à sa propre dynamique qui la porte vers une violence illimitée, elle débouche sur l'utilisation de l'arme nucléaire ? La célèbre définition de Clausewitz (« la guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens ») est-elle toujours valable ? Pour répondre à ce problème, nous suivrons d'abord l'analyse de Clausewitz. Clausewitz ne s'interroge pas sur la signification anthropologique de la guerre (résulte-t-elle d'un penchant humain?), il n'en discute pas la légitimité (y a-t-il des guerres justes?), il ne porte pas sur elle un jugement moral. La guerre est à ses yeux un fait dont il faut comprendre la nature et découvrir les lois. Cette étude exige qu'on cesse de la considérer simplement comme un phénomène irrationnel, le déchaînement aveugle d'une violence collective. 1- La guerre apparaît ordinairement comme un phénomène irrationnel pour trois raisons : a- Elle témoigne de l'existence d'un penchant humain à l'agression et à la destruction (Freud : Propos d'actualité sur la guerre et la mort (1915), Pourquoi la guerre ? (correspondance avec Einstein, 1932) b- En tant qu'elle est l'expression arbitraire du droit du plus fort, elle est injustifiable juridiquement (violation du droit) c- En tant qu'elle est dans son principe la négation du genre humain, elle est injustifiable moralement (Kant, conclusion de la Doctrine du droit) 2- La volonté de faire la guerre n'est pas simplement l'expression d'un penchant naturel à l'agression a-Elle a une rationalité : c'est une force organisée, une violence contrôlée et dirigée b- Faire la guerre, ce n'est pas simplement tuer et se faire tuer, c'est être prêt à mourir pour tuer un ennemi (Alain : « Il faut des maximes qui tuent », § 90 de Mars ou la guerre jugée) c- La logique interactive de la guerre (elle est comme un « duel ») empêche qu'on la réduise à l'expression d'une agressivité naturelle (De la guerre I, 1 et VI, 7, Clausewitz) 3- La guerre tend par elle-même à « monter aux extrêmes » (De la guerre, I, 2 et 3,Clausewitz) a- Le « concept pur » de la guerre : la dynamique constitutive de la guerre comme montée aux extrêmes b- Du concept pur de la guerre à la réalité des guerres : les raisons pour lesquelles elles ne montent pas aux extrêmes 4- « La guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens » (VIII, 6) Conclusion : la guerre ne rompt pas avec la politique et par bien des aspects elle lui ressemble, mais en même temps, elle risque de lui échapper car elle est une violence potentiellement illimitée. Qu'en est-il alors du risque que constitue l'usage de l'arme nucléaire ? La guerre est-elle vraiment la continuation de la politique par d'autres moyens ? Bibliographie : De la guerre, surtout les Livres I et VIII, Clausewitz Penser la guerre, Raymond Aron En rapport avec le thème de la guerre et de la paix, voir le podcast de l'émission des Rendez-vous de Philopop : « La mondialisation est-elle un doux commerce ? »
50 minutes | Feb 20, 2022
Les Rendez-vous de PHILOPOP : Angoissante liberté
Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 20 février 2022 Angoissante liberté Réflexion à partir de la lecture de l'Etre et le Néant de J.P. Sartre (1943). En quel sens les hommes sont-ils libres ? Comment leur liberté se révèle-t-elle à eux ? Pourquoi ignorent-ils le plus souvent ce qu'elle est et tentent-ils de la fuir? 1- La liberté est « l'être de la réalité humaine » a- La conscience fait de l'homme un être libre. Elle n'a pas l'être d'une chose, elle est un mouvement qui la porte au dehors d'elle même en ce qu'elle est toujours « conscience de quelque chose ». Elle est ainsi « l'être qui est ce qu'il n'est pas et n'est pas ce qu'il est » (conscience d'un arbre, elle est en même temps cet arbre qu'elle n'est pas et elle n'est pas cet arbre dont elle se distingue).b- En tant que j'ai conscience de moi, je suis en même temps ce moi dont j'ai conscience et je ne le suis pas. La liberté est cette impossibilité pour l'homme de coïncider avec son être, qui fait qu'il a toujours à être 2- C'est dans l'angoisse que les hommes découvrent le fait irrémédiable de leur liberté a- L'exemple du vertige : la différence entre la peur et l'angoisseb- « Je m'angoisse parce que mes conduites ne sont que possibles ». La découverte d'une liberté sans attaches : il ne tient qu'à moi de m'éloigner du précipice ou de m'en approcher : rien ne détermine mon choix.c- Nous voudrions pouvoir échapper à notre liberté, l'angoisse nous révèle que c'est impossible : « Nous sommes condamnés à être libres ». Nous n'avons pas le choix d'être libres ou non, nous n'avons pas le choix de ne pas choisir. 3- La « mauvaise foi » comme tentative d'échapper à sa liberté et d'être comme une chose a- Elles est ce mensonge à soi-même qui est rendu possible par le mode d'être de la réalité humaine (sa liberté)b- Parmi les exemples donnés par Sartre, celui de l'homosexuel qui, honteux d'être homosexuel dans une société homophobe, dénie son homosexualité (il prétend n'être aucunement ce qu'il est et se définit comme ne l'étant pas)c- Dans l'ordre de l'action, la mauvaise foi se traduit par « l'esprit de sérieux » (exemple de l'antisémite dans les Réflexions sur la question juive, 1946) 4- La liberté en situation a- Ne pas confondre la liberté ontologique de l'homme qui constitue sa réalité et l'usage qu'il fait de sa liberté « en situation ». La situation qui s'impose à lui ne détermine pas le sens qu'il choisit de lui donner (exemple du rocher)b- Loin que le passé détermine le présent, c'est le futur (qu'on projette de réaliser) qui décide du sens du passé (l'exemple de la crise mystique de l'âge de 15 ans et celui de la continuation ou de la rupture du lien conjugal) 5-Il y a des situations qui révèlent au plus haut point notre liberté (La République du silence, dans Situations III) a- « Jamais nous n'avons été plus libres que sous l'occupation allemande (…) A cause de tout cela, nous étions libres »b- « Il n'y a pas de situation inhumaine ». C'est la conscience qui décide seule de son sens : il est possible que je résiste à la torture pour ne pas trahir mes camarades (« Si on me torture, tiendrai-je le coup? ») Bibliographie : - L'Etre et le Néant de J.P. Sartre (1943) chez Tel/ Gallimard, plus particulièrement la 1ère partie chapitre 1 (« l'origine du néant ») et chapitre 2 (« la mauvaise foi »), ainsi que le début de la 4ème partie (« Etre et faire : la liberté ») - Les Réflexions sur la question juive (le portrait de l'antisémite) 1946, collection Essais en Folio - https://www.youtube.com/watch?v=Qc0WvffrlIU, archive France Culture « la liberté selon JP Sartre », texte de Sartre lu par lui-même, paru la 1ère fois en 1944 dans Les Lettres françaises et publié ensuite sous le titre « La République du silence » dans Situations III chez Gallimard
51 minutes | Jan 23, 2022
Les Rendez-vous de Philopop : L'état d'urgence : une menace pour la sûreté des citoyens ?
Les Rendez-vous de PHILOPOP- émission du 23 janvier 2022L'état d'urgence : une menace pour la sûreté des citoyens ? Réflexion à partir de la lecture de l'Esprit des Lois de Montesquieu (1748), Etat d'urgence contre le terrorisme (novembre 2015), état d'urgence sanitaire (depuis mars 2020) … L'état d'urgence est en principe un état temporaire qui, pour faire face à un péril imminent, confère des compétences exceptionnelles au pouvoir exécutif et aux autorités administratives, et conduit exceptionnellement à restreindre des libertés. Mais l'inscription au droit commun des mesures d'exception d'abord présentées comme provisoires et la pérennisation de l'état d'urgence ne conduisent-elles pas l'Etat à suivre inexorablement la pente de ce que Montesquieu appelait le « despotisme » ? Jusqu'où l'Etat peut-il aller sans se transformer en instrument d'oppression ? Pour Montesquieu, le mal à combattre est toujours l'arbitraire, sous quelque forme que ce soit, car il est source de violence et de crainte. Aussi définit-il la liberté politique comme son antidote : elle est « cette tranquillité d'esprit qui provient de l'opinion que chacun a de sa sûreté » (XI, 6). Comment l'établir et la maintenir ? Comment instituer l'Etat si l'on veut qu'il protège la liberté politique et ne puisse tomber dans « l'abus de pouvoir » ? Nous allons suivre la démarche de Montesquieu dans les Livres XI et XII de L'Esprit des Lois. 1- L'institution de l'Etat est nécessaire pour établir la liberté et mettre un terme à l'arbitraire et à la violence auxquels les hommes seraient livrés s'il ne réglait pas leur coexistence par des lois (Montesquieu ne distingue pas Etat et gouvernement). Au comble de l'arbitraire, il y a le gouvernement despotique où « un seul, sans loi et sans règle, entraîne tout par sa volonté et par ses caprices » (II, 1). A ce gouvernement s'opposent les « gouvernements modérés » qui sont réglés par des lois (nous les appelons aujourd'hui Etats de droit) 2- Il faut que dans ces Etats une constitution distribue les pouvoirs dans des mains distinctes pour assurer vraiment les conditions de la liberté politique. a- Le despotisme ne désigne pas seulement le gouvernement despotique, il est aussi une menace qui pèse sur les gouvernements modérés quand il y a « abus de pouvoir ». Pour éviter ce mal, la solution est de le diviser et « d'arrêter le pouvoir par le pouvoir » par une constitution qui distribue les pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire) dans des organes distincts b- L'exemple de la Constitution d'Angleterre permet d'étudier les conditions de la liberté politique: 1- on y trouve un équilibre des pouvoirs législatif et exécutif par leur liaison et leur enchaînement (ils ne sont pas séparés, sinon ils ne pourraient pas se faire contrepoids) ; 2- on y trouve un partage du pouvoir législatif entre des forces sociales et politiques aux intérêts opposés (les nobles et le peuple) ; 3- le seul pouvoir qui est séparé des deux autres, est le pouvoir judiciaire (indépendance de la justice). 3- Il faut encore que cesse l'arbitraire qui affecte les lois pénales (« les lois criminelles ») : « C'est de la bonté des lois criminelles que dépend principalement la liberté du citoyen » (XII, 2). Pour cela : a- Il faut une procédure rigoureuse d'instruction qui protège l'innocence des citoyens (« Quand l'innocence des citoyens n'est plus assurée, la liberté ne l'est pas non plus ») b- Le criminel ne doit pas être confondu avec un ennemi : il est d'abord un citoyen dont il faut protéger les droits jusqu'au moment où cette protection cesse, une fois sa culpabilité établie et sa peine prononcée. Celle-ci ne doit pas être confondue avec une « rétention de sûreté » qui consiste à interner préventivement un individu considéré comme « suspect » ou « dangereux » (voir l'évolution sécuritaire du droit pénal contemporain) c- Il faut une qualification précise des crimes et une classification qui assure une juste proportion entre les crimes et les peines (la criminalisation des opinions et des actions  « qui choquent la religion », les blasphèmes, entraîne une violence sans limite et « détruit la liberté des citoyens ») et encore un usage modéré des peines qui tienne compte des limites naturelles de la sensibilité humaine  (la surenchère répressive ne fait pas reculer la criminalité). Conclusion : La pérennisation de l'état d'urgence risque de transformer l'Etat de droit en Etat sécuritaire qui restreint et menace la liberté des citoyens. Sans des lois qui préservent les citoyens aussi bien de l'arbitraire des autres que de celui de l'Etat, la liberté ne peut être protégée. Elle est inséparable de la sûreté. Bibliographie : De l' Esprit des Lois de Montesquieu, surtout les livres XI et XII (1748)Montesquieu, les lois et les mœurs, par Didier Carsin, collection « Philosophie en cours » chez Démopolis (2017)Libertés et sûreté dans un monde dangereux par Mireille Delmas-Marty au Seuil (2010)Penser l'ennemi, affronter l'exception, par J.C. Monod, édition La Découverte/poche (2016)La Démocratie en état d'urgence par Stéphanie Hennette-Vauchez au Seuil (2022)Pauses musicales :J.S. BACH, CONCERTO NO.5 IN F-MINOR FOR HARPSICHORD AND STRINGS (BWV 1056) - LARGO, MARIA JOÃO PIRESFauré: Pavane / Rattle · Berliner PhilharmonikerJohann Sebastian BACH: Adagio, BWV 974
50 minutes | Dec 19, 2021
Les Rendez-vous de Philopop : Que signifie "être français"?
Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 19 décembre 2021 Que signifie : «être français»? L'identité nationale est-elle essentiellement une affaire d'origine? La nation est-elle une «mère»? Notre réflexion s'appuiera sur la lecture de la conférence d'Ernest Renan, prononcée à la Sorbonne en 1882, Qu'est-ce qu'une nation? Cette conférence fait souvent référence. 1- Le contexte historique: l'annexion à l'Allemagne de l'Alsace et de la Moselle en 1871 La discussion entre Renan et l'historien allemand David Strauss Si l'identité nationale est une affaire d'origine, D. Strauss a raison: l'Alsace et la Moselle sont allemandes 2- La méthode de la conférence: examiner les différents critères qui sont proposés de la nation afin d'établir celui qui est légitime - La nation n'est ni une race, ni une ethnie, ni une langue, ni une culture Définir l'identité nationale en termes d'origine culturelle, c'est enfermer les hommes dans une identité particulière figée et nier leur dimension universelle : « N'abandonnons pas ce principe fondamental, que l'homme est un être raisonnable et moral, avant d'être parqué dans telle ou telle langue, avant d'être membre de telle ou telle race, un adhérent de telle ou telle culture » La nation n'est rien sans la volonté des hommes. Sa définition légitime : «La nation est un principe spirituel (…) L'existence d'une nation est un plébiscite de tous les jours». 3 – La nation «est un plébiscite de tous les jours» fondé sur une mémoire commune Elle n'est pas une pure construction de la volonté : les hommes ne peuvent vouloir continuer de vivre en nation sans la mémoire d'un passé commun Il faut distinguer la question des origines de la nation de celle de son principe (qui est pour la 1ère fois affirmé par la Révolution française de 1789) La mémoire sur laquelle est fondée la nation, est une mémoire affective, nécessairement sélective et oublieuse, qui permet de préserver son existence 4- Examen critique de la thèse de Renan: si la nation a besoin d'être portée par une mémoire commune, l'histoire est-elle pour elle une menace, en tant que discipline critique? Les nations sont des constructions historiques dont l'unification s'est faite le plus souvent au prix de conflits violents (par exemple, la croisade des Albigeois aux XII et XIII èmes siècles, les guerres de religion au XVI ème siècle en France) Pour préserver leur existence, faut-il bannir les études historiques qui impliquent un regard critique à l'égard de la mémoire des hommes? L'adhésion à la nation exige-t- elle une forme d'idéalisation du passé qui repose sur l'oubli de ses pages noires? Un exemple d'occultation du passé : le «mythe résistancialiste » selon lequel la grande majorité des Français avaient combattu l'occupant nazi pendant la seconde guerre mondiale (Henry Rousso, dans le Syndrome de Vichy) Une nation qui n'assume pas son passé a-t-elle un avenir? Bibliographie : Qu'est-ce qu'une nation ?, par Ernest Renan, collection Champs/Flammarion Le syndrome de Vichy, par Henry Rousso, Editions Seuil Vichy, un passé qui ne passe pas, par Henry Rousso et Eric Conan, Collection Folio Cette émission a été donnée sous un autre titre (La nation est-elle une «mère»?) le 28 juin 2020 sur Radio Ouest track.
50 minutes | Nov 28, 2021
Les Rendez-vous de Philopop : L'antisémitisme
Nous aborderons la lecture des Réflexions sur la question juive de Sartre. Quand le texte paraît en 1946, Sartre n'a pu mesurer l'ampleur du génocide des Juifs dans les camps de la mort. Mais même si son propos se limite à ce qu'il a pu observer de la situation des Juifs en France avant la guerre et sous l'occupation, il est très utile pour comprendre le phénomène de l'antisémitisme et réfléchir aux moyens de le combattre. 1- La formulation du problème : comment aborder la « question juive » ? (chapitre 2) Comme en témoigne la politique du gouvernement Pétain, qui promulgua un « statut des Juifs » et institua un « commissariat général aux questions juives », c'est l'antisémitisme qui est à l'origine de la « question ». a- Suffit-il de proclamer l'universalité des hommes, leur égalité de droits, pour protéger les Juifs de la haine des antisémites ? « Les Juifs ont un ami pourtant : le démocrate. Mais c'est un piètre défenseur » (…) « L'antisémite veut détruire le Juif comme homme pour ne laisser subsister en lui que le Juif, le paria, l'intouchable ; le démocrate veut le détruire comme Juif pour ne conserver en lui que l'homme » b- Une universalité qui comprend toutes les différences humaines ne peut se concevoir en termes de « nature humaine » mais de « condition humaine ». Comment dès lors aborder la différence des Juifs : en quoi consiste leur « situation commune » et comment l'expliquer ? 2- Les caractéristiques de l'antisémitisme : le portrait de l'antisémite (chapitre 1) a- Il se présente comme une opinion alors qu'il est en réalité une passion. Ses faux arguments. b- La passion antisémite est une peur de la liberté ; elle est « une nostalgie de l'imperméabilité » c- L'antisémitisme est un irrationalisme : il est une haine de l'intelligence qui oppose à l'abstraction l'enracinement du « vrai » Français d- Il est fondé sur le ressentiment : l'antisémite a besoin de nier le Juif pour se sentir exister e- C'est un manichéisme : il interprète l'Histoire comme le combat purificateur du Bien contre le Mal incarné selon lui par le Juif 3- Qu'en est-il du Juif que l'antisémite veut détruire ? «  Le Juif existe-t-il ? Et, s'il existe, qu'est-il » ? (chapitres 3 et 4) a- En quoi consiste l'identité juive ? Si elle ne s'explique pas par la « race » (comme l'explique l'antisémite), vient-elle de la religion, ou d'une histoire commune ? b- Réponse de Sartre : « Le Juif se définit comme celui que les nations ne veulent pas assimiler(...) Le Juif est un homme que les autres tiennent pour Juif » . c- Face à une situation imposée historiquement par l'antisémitisme, les Juifs sont condamnés à un dilemme : choisir l'inauthenticité (fuir la situation, jouer à n'être pas Juif, chercher à tout prix « l'assimilation »), ou choisir l'authenticité (assumer sa spécificité juive : ses traditions, sa religion... « s'intégrer à la nation en tant que Juifs », et ce propos concerne « aussi bien les Arabes que les Noirs dès lors qu'ils sont solidaires de l'entreprise nationale  et ont droit de regard sur cette entreprise, comme citoyens») Conclusion : H. Arendt jugera sévèrement la thèse de Sartre sur l'identité juive, mais elle le rejoindra dans la critique qu'il fait d'un universalisme qui s'en tient abstraitement à la proclamation des droits de l'homme (c'est celui du « démocrate »). Le véritable universalisme exige de lutter concrètement contre les discriminations que subissent aussi bien les Juifs que tous ceux qui en France en 1946 se trouvent opprimés : les Arabes, les Noirs, les femmes. Sartre plaide ainsi en conclusion pour un « libéralisme concret» Bibliographie Réflexions sur la question juive, de Sartre, collection Folio, 1946 L'Etre et le Néant, 3ème partie : « Le pour-autrui », de Sartre, collection Tel chez Gallimard Sur l'antisémitisme de H. Arendt, collection Essais chez Calmann-Lévy, 1951
57 minutes | Oct 31, 2021
Les Rendez-vous de Philopop : Quand l'obéissance devient monstrueuse
Les Rendez-vous de PHILOPOP- émission du 31 octobre 2021 Quand l'obéissance devient monstrueuse Réflexion sur la « banalité du mal » à partir de la lecture de Eichmann à Jérusalem, rapport sur la banalité du mal, de Hannah Arendt (1963, collection Folio) et de Nous, fils d'Eichmann, de Günther Anders (1964 et 1988, collection Rivages) L'expérience du XXème siècle (guerres mondiales, régimes totalitaires, génocides) nous conduit à conclure comme l'historien américain Howard Zinn (discours à l'Université de Baltimore en 1970) que « notre » problème c'est l'obéissance et non pas, comme on le pense habituellement, la désobéissance. L'exemple d' Eichmann, l'organisateur de la Solution finale, est souvent invoqué pour montrer comment l'obéissance peut devenir monstrueuse. Hannah Arendt parle à son propos de la « banalité du mal ». Mais, comme l'affirment aujourd'hui de nombreux historiens, Hannah Arendt ne s'est-elle pas égarée en voyant en Eichmann un bureaucrate insignifiant qui obéissait aveuglément aux ordres de sa hiérarchie ? Par « banalité du mal », n'entend-elle pas une forme d'obéissance bornée qui reviendrait en définitive à déresponsabiliser Eichmann ? Quels sont les vrais ressorts de l'obéissance monstrueuse qui a fait tant de ravages dans notre monde contemporain ? La lecture de l'Essai d'Hannah Arendt nous montrera que les critiques qui lui sont souvent adressées, ne tiennent pas vraiment compte de sa démonstration. L'expression de « banalité du mal » est trop souvent soumise à des contre-sens. Ces critiques correspondent en revanche beaucoup mieux aux textes que Günther Anders a consacrés lui même au cas Eichmann. Il sera ainsi très intéressant de comparer les œuvres et de les confronter. 1- Lecture d'Eichmann à Jérusalem : l'obéissance d'Eichmann était-elle une « obéissance quasi robotique » (selon la formule de l'historien David Cesarani) ? a- Une obéissance particulièrement zélée : 1- la bureaucratie en régime nazi ; 2- Eichmann est un gestionnaire performant (son activité à Vienne en 1938) b- Eichmann revendiquait la moralité de ses actions : 1- la citation qu'il fait de « l'impératif catégorique » de Kant et sa déformation ; 2- il était capable de désobéir aux ordres quand ils contredisaient la loi (c'est à dire la volonté du Führer), il désobéit ainsi en 1944 à Himmler c- Comment s'opère en un homme normal comme Eichmann la perversion de la loi qui exige de lui qu'il considère l'extermination des Juifs comme un devoir : 1- la perversion de la loi (« La loi du pays d'Hitler exigeait que la voix de la conscience dise à chacun : Tu tueras) ; 2- les procédés mis en œuvre par les nazis pour anesthésier la conscience morale ordinaire (les « règles de langage ») d- L' « absence de pensée » de Eichmann constitutive de la banalité du mal : ni stupidité, ni obéissance robotique, mais choix de ne plus juger, de ne plus avoir à penser aux conséquences de ses actes (exemple de l'épisode de sa conversation avec le capitaine Less) 2- Lecture de Nous, les fils d'Eichmann : Eichmann, exécutant robotique d'un système technique monstrueux a- La puissance de déshumanisation de la technique moderne menace de monstruosité notre monde contemporain b- les « deux racines du monstrueux » : la fragmentation technique des tâches a pour effet d'anesthésier moralement les individus (exemple d'Eichmann comme illustration) ; un monde en passe de « devenir machine » et de transformer les hommes en rouages Conclusion : Deux interprétations différentes du cas Eichmann, deux analyses quasi-opposées des ressorts de l'obéissance monstrueuse qui ravage le monde contemporain (un engagement zélé, monstrueux, où prévaut l'adhésion à l'idée totalitaire, d'un côté ; un système monstrueux de l'autre qui tend à fabriquer des hommes indifférents, bornés à des préoccupations techniques). Bibliographie : outre les deux œuvres citées, - Désobéir par Frédéric Gros chez Albin Michel - Adolf Eichmann, comment un homme ordinaire devient un meurtrier de masse, par David Cesarini, collection Texto, chez Tallandier - La révolution culturelle nazie, par Johann Chapoutot, Editions Gallimard Cette émission reprend en partie une conférence donnée à l'Université populaire du Havre : https://www.franceculture.fr/conferences/universite-le-havre-normandie/eichmann-mediocre-criminel-de-bureau-ou-monstre
31 minutes | Sep 19, 2021
Les Rendez-vous de Philopop : Présentation des activités et du programme de PHILOPOP 2021-2022
La première séance aura lieu le jeudi 23 septembre de 20H30 à 22H30 au lycée Claude Monet du Havre. N'hésitez pas à consulter le site internet de l'association:(https://sites.google.com/site/philopoplh/), pour prendre connaissance des règles sanitaires exigées. Outre les séances qu'elle organise régulièrement au lycée Claude Monet, PHILOPOP donne une émission mensuelle (lesRendez vous de Philopop) sur Ouest Track radio. 1- PHILOPOP, une association ouverte à tous Quelques précisions d'ordre pratique  : Vous trouverez sur le site de PHILOPOP (https://sites.google.com/site/philopoplh/) le barème des cotisations, le calendrier adopté, le rythme des séances (en moyenne 2 fois par mois un mardi ou un jeudi de septembre à début juin hors vacances scolaire), le lieu et l'horaire  (au Lycée Claude Monet du Havre, salle audio, de 20H30 à 22H30) Les questions philosophiques  : des questions que tout homme peut être amené à se poser au cours de son existence (exemples de la vérité, de la justice, de la liberté...) L'ambition de PHILOPOP : permettre à tous ceux qui le souhaitent d'accéder à un questionnement philosophique en offrant les conditions d'un travail suivi 2- La formule d'un cours progressif (suivi d'une discussion) Il ne consiste pas dans un exposé de connaissances et ne présente pas la pensée des philosophes comme une opinion savante Il montre comment l'examen d'une notion (la vérité, la justice, la liberté, la mémoire...) conduit à formuler un ou des problèmes qui s'imposent nécessairement. La lecture des philosophes n'a pas d'autre intérêt que d'éclairer la réflexion, et de l'aider à aborder ces problèmes. 3- Le programme de la saison 2021-2022 Les séances sont accompagnées d'un plan et enregistrées. L'enregistrement est accessible aux adhérents Le thème  : La mémoire L'oeuvre  : L'Etre et le Néant de J.P. Sartre, TEL/ Gallimard L'émission des Rendez vous de Philopop de ce dimanche 19 septembre (reprise le dimanche 26 septembre) n'a d'autre but que de vous expliquer la démarche de l'association (Philopop, association populaire de philosophie du Havre, créée en 2007) et de vous présenter brièvement le programme de la saison 2021-2022 Les 3 premières séances au lycée Claude Monet: Jeudi 23 septembre, Mardi 12 octobre, Jeudi 21 octobre Site internet de PHILOPOP: https://sites.google.com/site/philopoplh/
51 minutes | Jun 27, 2021
Les rendez-vous de Philopop : A la recherche de la moitié perdue
Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 27 juin 2021 A la recherche de la moitié perdue Du désir à l'amour Nous aborderons la lecture du mytheprésenté par Aristophane dans le Banquet de Platon. Elle sera l'occasion de réfléchir au sens de l'expérience amoureuse. Ce dialogue a été probablement rédigé vers 375 avant J.C. Le mythe explique la condition humaine par un passé surnaturel : si les amoureux ne veulent faire qu'un, c'est parce qu'autrefois ils furent un 1- La lecture du mythe : Ce qu'était notre nature originelle Zeus punit les hommes archaïques en les coupant en deux : les hommes devenus des demi-portions sont condamnés à rechercher la moitié dont ils ont été séparés. Le désir résulte du châtiment divin. Comme, dans cette quête désespérée, les hommes risquent de dépérir, Zeus doit inventer la sexualité pour permettre aux hommes de trouver un répit momentané grâce à l'orgasme et se reproduire L'amour est ainsi le «médecin des âmes» qui guérit la nature humaine en «rassemblant les parties de notre antique nature» 2- L'amour réalise-t-il vraiment l'union parfaite des moitiés? Peut-on lire le mythe au pied de la lettre? Les indices qui mettent en doute son enseignement apparent : l'étrange intervention d'Héphaïstos, le dieu forgeron; la tentative insensée des ancêtres d'escalader les cieux et de rivaliser avec les dieux. 3- L'attrait exercé par ce mythe sur la psychanalyse Lectures conseillées: Le Banquet de Platon (G/F) Malaise dans la culture de Freud Ethique III, propositions 9 et 13, de Spinoza Voir la vidéo-conférence « L'amour selon Spinoza dans l'Ethique » https://www.youtube.com/watch?v=zpeZWOVdTh0, où Spinoza fait la critique de la conception du désir et de l'amour sous-jacente au mythe d'Aristophane.
59 minutes | May 30, 2021
Les Rendez-vous de Philopop : Vers un monde sans visage ?
Les Rendez-vous de PHILOPOP,émission du 30 mai 2021 Vers un monde sans visage? Masque sanitaire, gestes barrière, distanciation sociale, télé-travail, enseignement distanciel... Le monde à venir est-il appelé à devenir un monde sans visage? Pourquoi nous semble-t-il si important de rencontrer les autres et de voir leur visage? Sommes-nous engagés dans un processus de désincarnation inquiétant ? Pour répondre à cette interrogation, nous nous demanderons: 1- Que faut-il entendre par visage: est-il la même chose que la face, la figure, le faciès ? a- de la face au visage : l'originalité de la face humaine (la station debout libère à la fois la main et la face, voir Aristote (4ème siècle av. J.C) dans le traité Des parties des animaux, et aussi le paléontologue Leroi-Gourhan, Le geste et la parole, 1964) b- l'étymologie du mot visage vient du latin «visus» qui désigne ce qui est vu. Le visage témoigne de notre humanité et de notre singularité. Il n'est pas réductible à la face qui est son support anatomique, ni à la figure qui est son vecteur d'expression. Il se caractérise par son expressivité c- Pourquoi le visage peut-il être expressif? Il est une totalité perpétuellement en mouvement qui ne se réduit pas à la somme des parties de la figure. Ses expressions sont des signes qui donnent à voir des émotions, sentiments, pensées... . Un visage ne peut devenir expressif si l'individu est privé de toute communication (l'exemple célèbre de l'enfant sauvage, Victor de l'Aveyron) d- Est-il possible de connaître l'intériorité d'un homme en observant les traits et les expressions de son visage ? : de l'impression première produite par un visage (exemple de Montaigne dans Essais III, chapitre 12 «Sur la physionomie») au projet d'une «science» du visage (= d'une «physiognomonie») qui prétend établir le caractère d'un homme à partir de l'observation des traits de son visage, et à celui des « théories raciales » qui prétendent établir son type racial. Ces prétendues théories réduisent le visage à la face et à la figure. 2- La négation du visage comme négation de l'humanité Priver un homme de son visage, c'est nier sa singularité d'homme et s'autoriser à le détruire. Voir le film Monsieur Klein de Joseph Losey, l'exemple de l'exposition «Le Juif et la France» de 1941 ; les témoignages des déportés rescapés sur les camps de concentration et d'extermination (Primo Levi, Si c'est un homme, Robert Antelme, L'espèce humaine) 3- Le mystère du visage a- « La meilleure manière de rencontrer autrui, c'est de ne même pas remarquer la couleur de ses yeux » (Levinas, Ethique et infini, 1981) b- «L'accès au visage est d'emblée éthique» : il est à la fois appel au meurtre et injonction de ne pas tuer. La barbarie exterminatrice s'accomplit d'autant plus facilement qu'elle prive les victimes de leur visage c- Le danger d'un effacement des relations humaines par le moyen des nouvelles technologies (le numérique) Bibliographie : Montaigne, Essais livre III, chapitre 12, Sur la physionomie Primo Levi, Si c'est un homme ; Robert Antelme, L'espèce humaine Emmanuel Lévinas, Ethique et infini
42 minutes | Apr 25, 2021
Les Rendez-vous de Philopop : Prométhée, de la technique à la politique
Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 25 avril 2021 Prométhée, de la technique à la politique Nous aborderons la lecture du mythe de Prométhée présenté par le sophiste Protagoras dans le dialogue éponyme de Platon. (édition Garnier/Flammarion, traduction de F. Ildefonse). Cette lecture nous permettra de réfléchir aux questions de la nature humaine, de la technique et de la politique. Ce dialogue a été probablement rédigé vers 390 avant JC. C'est la 3ème version du mythe de Prométhée, après celle du poème Les Travaux et les jours d'Hésiode (entre le VIIIème siècle et le VIIème siècle avant JC), et après celle de la tragédie Le Prométhée enchaîné d'Eschyle (au début du Vème siècle avant JC). 1- Lecture du mythe de Prométhée dans le Protagoras de Platon a- La distribution par Epiméthée des capacités qui doivent permettre aux animaux d'assurer leur conservation b- L'étourderie d'Epiméthée  et le vol de Prométhée pour la réparer. Epiméthée a oublié de doter l'homme et il ne lui reste plus aucune capacité à distribuer. Son frère Prométhée « voit tous les vivants harmonieusement pourvus en tout, mais l'homme nu, sans chaussures, sans couverture, sans armes ». Le vol du savoir technique et du feu aux dieux Héphaïstos et Athéna par Prométhée permet aux hommes d'assurer leur conservation par l'invention des techniques c- La technique ne suffit pas à assurer la conservation des hommes. Il leur faut aussi l'art politique, sinon ils risquent de périr sous les coups des bêtes sauvages et .par la violence des autres hommes d- L'intervention de Zeus : son messager Hermès est chargé d'apporter aux hommes la vergogne et la justice, qualités morales qui permettent d'acquérir et d'exercer l'art politique. De quelle manière doit se faire le don de ces qualités ? Il y a deux solutions : ou les donner seulement à quelques uns comme c'est le cas de l'art médical, ou les donner à tous. Zeus choisit la 2ème solution, elle fonde la démocratie. 2- L'intérêt de cette lecture : a- Une réflexion sur la politique : est-elle une affaire d'experts ou est-elle l'affaire de tous ? (l'opposition entre Protagoras et Platon)  b- Une réflexion sur l'homme et la technique : l'homme est-il un animal démuni qui doit compenser sa vulnérabilité naturelle par la technique, ou est-il au contraire un animal avantageusement organisé par sa constitution physique ? (la réfutation de la thèse de Protagoras par Aristote, dans le traité Les Parties des animaux, l'exemple de la polyvalence de la main) Lecture conseillée : Le Protagoras de Platon, édition G/F
62 minutes | Mar 28, 2021
Les Rendez-vous de Philopop : La Mémoire
Notre réflexion s'appuiera sur la lecture du dernier ouvrage de Paul Ricoeur, La Mémoire, l'histoire, l'oubli (Editions du Seuil, 2000). Si la mémoire est, comme on la représente souvent, un magasin localisé dans le cerveau où sont inscrites les traces des impressions laissées en nous par les événements passés, comment ces traces peuvent-elles les représenter alors qu'ils ne sont plus ? Présenter des traces cérébrales comme des traces « mnésiques », ce n'est pas résoudre cette énigme, c'est la supposer déjà résolue. Une réflexion philosophique sur la mémoire doit au contraire s'y confronter. 1- La double énigme de la mémoire a/ L'énigme de la représentation présente d'une chose absenteLa métaphore de l'empreinte d'un sceau dans un bloc de cire, utilisée par Platon dans le Théétète, présuppose que le souvenir est comme l'image d'une chose qui a été gravée dans l'âme et laisse ainsi son empreinte b/ L'énigme du rapport de l'image du souvenir à une expérience antérieure « Chaque fois que l'on fait acte de mémoire parce qu'on a déjà vu, entendu ou appris telle chose, on perçoit que cela s'est produit antérieurement », Aristote dans De la mémoire et de la réminiscence, « Le souvenir est quelque chose qui tranche sur le présent, c'est ainsi que nous le reconnaissons comme souvenir », Bergson dans Matière et mémoire. c/ L'examen de cette double énigme permet de distinguer deux types de défaillance de la mémoire : 1-elle prétend connaître le passé, or sa représentation peut être infidèle ; 2- elle prétend le retrouver, or l'impression qui en a été laissée peut s'effacer, et l'effort de remémoration peut échouer à l'atteindre 2- L'oubli est-il l'ennemi de la mémoire ? a/ La mémoire comme lutte contre l'oubli, voir la préface d'Hérodote à ses Enquêtesb/ Une mémoire parfaite serait un mémoire morte (voir la fiction de Borgès, Funès ou la mémoire) ; l'oubli est la condition de sa vitalité (on ne devrait pas parler d'une « mémoire » de l'ordinateur)c/ Ses défaillances ne peuvent entamer notre confiance : elle est notre seul mode d'accès au passé (l'histoire ne peut s'en passer : elle présuppose le témoignage)d/ Le « petit miracle de la reconnaissance » (Ricoeur) permet de donner une solution pratique à l'énigme que constitue la représentation présente d'une chose antérieure et absente : elle permet de présupposer rétrospectivement que l'image du passé (le souvenir) n'a pas disparu mais a survécu pour pouvoir être maintenant reconnuee/ Cette analyse permet d'opposer deux figures de l'oubli : soit un oubli destructeur qui s'explique par l'effacement des traces, soit un oubli qui n'est qu'un empêchement provisoire et laisse espérer un recouvrement du passé 3- La survivance du souvenir : examen de la notion de « trace » a/ Trace psychique (=le souvenir comme impression vécue) et trace cérébrale (voir les neurosciences)b/ Le caractère problématique de la notion de « trace mnésique » : une trace matérielle peut-elle signifier un passé ?c- La trace psychique (le souvenir) a par elle même le pouvoir de survivre (voir Matière et mémoire de Bergson) : la mémoire est ainsi le passé qui se conserve tout entier en moi ; elle n'est pas une faculté de conservation qu'il faudrait localiser dans le cerveau. d- Dans cette perspective, l'oubli désigne le caractère inaperçu (inconscient) de la persévérance du souvenir, il met le passé en réserve (c'est un « oubli de réserve » , Ricoeur). Il faut distinguer deux formes de pathologie : la mémoire détruite (la maladie d'Alzheimer), et la mémoire blessée (l'exemple de l'hystérie, voir la 1ère leçon sur la psychanalyse de Freud) Lectures conseillées : La mémoire, l'histoire, l'oubli de Paul Ricoeur, Editions du Seuil 2000Psychopathologie de la vie quotidienne et 1ère leçon sur la psychanalyse de FreudMatière et mémoire de Bergson, chapitres 2 et 3 Funès ou la mémoire de Borgès
62 minutes | Feb 28, 2021
Les Rendez-vous de Philopop : Réflexion sur les causes et les effets des conflits religieux
Réflexion sur les causes et les effets des conflits religieux Confronté à la violence des guerres de religion qui opposent à son époque catholiques et protestants, Montaigne (1533-1592) abandonne toute perspective théologique axée sur la question des dogmes pour considérer seulement la religion dans ses effets pratiques. Plutôt que de chercher la vraie religion, il examine les effets de la religion sur le terrain politique. 1-La perspective traditionnelle sur la religion jusqu'à Montaigne : la justification de l’intolérance et de la persécution au nom de la vérité -La contrainte est nécessaire et légitime pour remettre les croyants égarés (les «hérétiques ») dans le droit chemin (Saint-Augustin (354-430): « il y a une persécution juste »)-Il faut distinguer deux sortes d'«infidèles», selon Thomas d'Aquin (1224-1274) : ceux qui n'ont jamais reçu la foi chrétienne (« Les Juifs et des païens»), et ceux qui l'ont reçue mais ont décidé de s'en écarter et s'obstinent dans l'erreur (les hérétiques). La tolérance à l'égard de ces derniers est une faiblesse coupable; elle est seulement requise dans le cas des premiers car ils sont moins dangereux (elle est alors une règle de prudence). 2- La tolérance religieuse comme politique pour établir la paix civile a- Les deux sens du terme de tolérance:• un sens premier, toujours présent, où tolérer, c’est accepter ce qui ne devrait pas être. C'est le sens utilisé par Montaigne : l'autorité politique tolère le culte protestant en promulguant un «édit de tolérance» ;• un sens moderne, où tolérer, c’est consentir qu’au nom de la liberté, en principe reconnue à tous, d’autres hommes expriment des croyances ou des opinions avec lesquelles nous sommes en désaccord. Ce sens ne peut pas encore être conçu au XVI ème siècle. b- La crise qui affecte l'Europe au XVI ème siècle avec le développement de la Réforme. Les circonstances de la rédaction de l'Essai sur la liberté de conscience , rédigé en 1578 (2 ans après la promulgation de l'édit de Beaulieu en 1576, 4 ans après les massacres de la Saint Barthélémy)c- Lecture de l'Essai sur la liberté de conscience (II, 19)• l'intolérance des Chrétiens qui commettent des «actes très condamnables»• le portrait de l'empereur romain Julien surnommé «l'Apostat » par les Chrétiens: un modèle moral (les vertus exemplaires de Julien); l'accusation injuste d'apostasie à son égard alors qu'il était contraint de dissimuler sa religion païenne dans sa jeunesse; un modèle d'homme politique• le modèle de Julien permet de formuler la question de l'efficacité politique de la tolérance religieuse 3- La véritable nature des conflits religieux a- la distinction entre la foi («infusion extra-ordinaire» qui vient de Dieu, et n'est connue que par une minorité d'hommes exceptionnels incapables de nuire aux autres) et la croyance religieuse ordinaire (l'homme tient à Dieu par des moyens seulement humains; cette croyance repose sur le hasard et la coutume)b- la majorité des chrétiens «se font croire» qu'ils croient; or ils n'ont pas la foi sinon ils la manifesteraient par leur conduitec- les motivations passionnelles qui sont à la source des croyances religieuses Conclusion: si l'on sait que les conflits religieux sont l'expression de conflits d'intérêts, d'ambitions sociales et politiques transférés au champ religieux, il est non seulement possible d'agir sur leurs effets mais aussi sur leurs causes.Lectures conseillées:Essai sur la liberté de conscience de Montaigne, Livre II chapitre 19, traduction Lanly dans la collection Quarto/Gallimard, Le début de l'Apologie de Raymond Sebon, Livre II chapitre 12 des EssaisSur la question de la Tolérance, vous pouvez écouter les séances enregistrées en 2015 (accompagnées de leur plan), accessibles sur le site de PHILOPOP: PHILOPOP Le Havre (google.com)
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