Une réinsertion entre oiseaux et humains avec Maya Kosa et Sergio Da Cost
Pour ceux n’ayant pas eu l’occasion de visionner le film, celui-ci met en scène Antonin, un jeune homme en convalescence d’une maladie qui l’avait isolé du monde, et qui, pour se réinsérer professionnellement, est placé au Centre ornithologique de Genthod, centre de soin pour oiseaux blessés. Il est accompagné de Paul, un futur retraité, qui doit le former, avant de prendre sa retraite.
Au cours de l’entretien, Théo Fragnière cherche à en savoir davantage sur la méthode de travail et de réalisation de Maya Kosa et Sergio Da Costa, ainsi que l’inspiration qui a motivé ce film.
Bien que l’écologie, la protection et le traitement des animaux, la réinsertion sociale et professionnelle soient des thèmes que l’on peut deviner dans le film, les deux réalisateurs mettent l’accent sur le fait que celui-ci se situe plus dans un registre poétique. Ils n’ont pas souhaité travailler à partir d’une thématique précise, mais plutôt s’imprégner du lieu de tournage et des personnes rencontrées.
Sergio Da Costa nous confesse que leur volonté est de provoquer des émotions et des sensations chez les spectateurs, quelque chose de l’ordre de la mélancolie face au monde qui disparaît. Il partage également l’importance qu’il porte à filmer l’humain et voir chez lui ses faiblesses et ses blessures, car, selon lui, chaque être humain cache une part de mystère. Le réalisateur cherche à voir une part de ce mystère, sans forcément aller trouver une réponse.
La question est posée concernant le style très singulier de ce film, à savoir, un format carré, peu de dialogue et presque silencieux, hormis le bruit des avions. Maya Kosa explique qu’ils souhaitaient que l’image corresponde à l’architecture du lieu. Les cabanes du centre sont des espaces confinés et carrés, nous dit-elle, et donc ce format était adapté à cette architecture. Elle ajoute que beaucoup de détails sont filmés avec un format large, car les oiseaux sont petits, et leur but était de se concentrer sur ces sujets plutôt que sur leur environnement, qui constituerait leur décor. L’attention au détail et à la réalité explique également la volonté de conserver dans le film le son bruyant des avions. En effet, cela illustre la forme de violence et d’hostilité que l’avion représente pour les oiseaux. Cela met également en perspective ces avions, qui sont des êtres mécaniques qui volent, et les oiseaux recueillis au centre, qui sont blessés et n’ont plus la capacité de voler.
L’île aux oiseaux est un film classé dans les documentaires mais également dans la fiction. Comment donc discerner ce qui est de l’ordre du réel de ce qui appartient au domaine de l’imaginaire en regardant le film? Maya Kosa et Sergio Da Costa sont conscients que ce mélange d’univers peut déranger le spectateur. Ce film a été réalisé, d’une part, comme un documentaire et, de l’autre, comme une fiction, représentant un personnage de fiction dans un environnement bien réel.
Vous l’aurez compris, documentaire ou fiction, le spectateur pourra se faire sa propre idée et si tout va bien, c’est le souhait des réalisateurs, il ne se posera même pas la question.